Titre provisoire



Bonjour.




Bon, voilà, lundi, je suis chez moi, tranquille, 2h du mat', cherchant le sommeil, quand, soudain, le jeu de mots fulgurant, "le crime de l'orient tex mex". Wahh.




Vite, il faut que je fonce au siège social d'hunlich.com, avenue Montaigne, que j'active les auteurs, les graphistes, les juristes.




Je prends ma voiture et démarre en trombe, le portable à l'oreille, télébrainstormant déjà avec le reste de l'équipe.




En chemin, les premiers développements me viennent, ce serait une page avec des chicanos à droite et dessous des commentaires fortement drôles, et puis un texte quelconque à gauche.




Feu rouge, une groupie me dévisage, elle me reconnaît, sursaute et se jette sur ma bagnole.




Pas le temps de verrouiller, elle se rue à l'intérieur, haletante, et éructe "Cilmalcheul ! Dis-moi blague ! Dis-moi blague !". Le coup classique.




Pff... Je vais pas lui donner mon nouveau joke exclusif, après, je connais l'histoire, le tout Paris sera au courant. Botus et mouche cousue.




Mais la fille s'impatiente, vite il faut trouver quelque chose, une vanne de secours, vite, vite. Sa mère, j'ai pas le temps pour ça, pas ce soir.




Vert, je suis encore sec, je redémarre, je trouverai bien dans la minute qui vient, une vanne, allez, juste une vanne...




J'ai bien "Iran, Iran, petit patapan", mais je me demande si c'est pas un peu hardcore, pour une jeune fan, comme ça, et puis, bon, pas sûr.




J'avance boulevard des Ternes et, au moment où je me décide pour "le pois sauteur des lilas", mon horizon visuel vire tout à coup au bleu marine.




"Police, vos papiers !"




Et vous savez quoi ? Ni une, ni deux, je me fais accuser d'avoir été en train de commettre un délit. La fille aurait été soit disant en fait une mineure de 17 ans de type roumano-pute. N'importe quoi ! Et comment j'aurais pu le savoir !




"Eh, écoute bien, connard de goret d'flicaille de merde, tu t'crois dans quel film, là ? T'sais qui ch'ui moi ? I' m'suffit d'un coup d'fil pour que d'main tu sois à l'ANPE dans la queue entre Rachid et Mamadou !", fais-je alors remarquer au représentant des forces de l'ordre, en lui montrant mon macaron hunlich.com.




Les schmits s'écartent et je reprends ma route. Quand même. On est en démocratie ou quoi ?




Deux jours plus tard, notre superproduction hispanisante commence à prendre forme, en dépit d'une certaine tension dans la rédaction. "A chaque fois c'est pareil, t'arrives avec ton jeu d'mots à la mord moi l'nœud et, après, c'est à nous d'ramer derrière pour écrire le récit qui va avec".




Jeudi, courrier. Convocation chez le juge. Inculpé. "Encourt trois ans de prison et 45.000 euros d'amende pour outrages à agents et pour avoir sollicité, accepté ou obtenu des relations de nature sexuelle de la part d'un mineur qui se livre à la prostitution". Hein !?




Pire, il y a eu des frites dans la presse, le soir même, en première page d'un grand quotidien du soir, ces affabulations grotesques s'étalent sur quatre colonnes.




Les articles se succèdent, l'autre radasse déclare que je suis un client régulier, qui paye en CB. Pire, les cops affirment avoir été insultés !




Pour couper court à la rumeur, je m'invite à France Info. "Je jure sur l'honneur n'avoir jamais fréquenté de prostituées de ma vie".




Je suis contraint de démissionner, afin de ne pas gêner hunlich.com et tout simplement pour rétablir la vérité !




Maintenant tout s'éclaire, c'est une manipulation, un complot qui vise à me déstabiliser ! Comme par hasard, un individu dont j'ignore tout se précipite dans ma BM, tient des propos incompréhensibles et comme par hasard 100 mètres plus loin, y'a les képis !




Mais qui est l'instigateur de toute cette mascarade ? A qui profite le crime ? Qui sont mes ennemis ?




Pas le temps de gamberger, on est déjà samedi, et viens le mariage de mon jaune ami Tieng, que je surnomme affectueusement "Jacky Chan".




Les festivités battent leur plein, mais je sens les crispations, la gêne qu'éprouvent mes interlocuteurs, j'en viens à soupçonner tout le monde.




Genre, lui, pourquoi il me regarde comme ça ? "Hein, gars, tu veux ma photo ou quoi ?"




"Et toi, niakoué, tu veux ma peau, c'est ça ? Avoue qu't'as tout manigancé ! Hein, avoue ! Hein ? Quoi ? Allez, parle !"




Coupe après coupe, le mousseux fait son effet, mes pensées deviennent moins claires. Après ma piètre performance à la course de brouette, retour dans la salle des fêtes.




J'ai passé toute la soirée à essayer d'investiguer, de démasquer les traîtres, d'imaginer les coups tordus qui se trament, d'élaborer une contre-attaque, mais, finalement, après des heures de torture mentale et de bad trip parano au milieu des nouaches, la seule conclusion à laquelle je suis arrivé, c'est...



Putain, c'est rude la chenille en fin de soirée.